L’adolescence : un âge de rébellion?

Poser un problème, c’est la première étape de sa résolution car comment résoudre une problématique, si au préalable on ne se donne pas les moyens de l’exposer avec clarté. En effet, nombreux sont ceux qui n’avancent pas dans la spiritualité car ne posant même pas les problèmes de leur rétrogradation dans la foi, à l’exemple de l’absence d’une sensibilité à même de rendre vivante notre adoration. Vivre enchaîné par des toiles de problématique sans pouvoir les poser mène, indubitablement, vers une vie de souffrance continuelle. Dans ce sens, la phase diagnostique est l’une des phases les plus importantes de la thérapie car elle a pour vocation de nous permettre de poser justement le problème afin que l’on puisse se donner les moyens de le résoudre comme on pourrait visualiser un adversaire ! En effet, il est bien difficile de se défendre face à un adversaire que l’on ne voit pas, et c’est pourquoi Satan œuvre, de toute son âme, à nous faire douter de son existence, de sorte qu’il puisse continuer à œuvrer à notre égarement, et ce, sans entraves. Ainsi, autant que tu dois rendre visible par la foi ton adversaire invisible qu’est Satan, et ce, pour pouvoir te défendre efficacement et éventuellement le terrasser, tâche aussi de rendre visible tes problématiques par l’action de les poser, histoire de te donner les moyens de les résoudre avec efficacité ! Pour ma part, le problème qui me concerne et que j’aimerais résoudre est celui de la foi. J’ai connu, étant enfant, un degré de palpation du divin que j’ai malheureusement perdu à l’adolescence. J’ai même assimilé cela à l’époque, je me rappelle, à de l’athéisme quand j’invoquais mon Seigneur de la sorte : « Si tu existes manifeste-toi par des signes évidents !» L’adolescence est une période particulière de l’existence car l’individu entre dans la puberté c’est-à-dire qu’il va subir durant cette phase : des transformations physiques et développer consécutivement des pulsions, essentiellement la pulsion sexuelle. Cette transformation en direction de la maturité ne s’opère pas à vitesse égale entre les différentes dimensions de la personnalité, si bien qu’une perturbation comportementale est souvent provoquée par l’écart entre le développement physique et le développement intellectuel, qui quant à lui, est bien plus lent que le premier. Ainsi, l’adolescence est une âge propice au recul spirituel voire à la rébellion car l’adjonction d’une pulsion à même de le rendre plus libre risque de l’écarter indubitablement de la droiture. Pourquoi me direz-vous ? La réponse se trouve dans l’explication du verset du dépôt : « Nous avions proposé aux cieux, à la terre et aux montagnes la « amana ». Ils ont refusé de la porter et en ont eu peur, alors que l’homme s’en est chargé; car il est très injuste (envers lui-même) et très ignorant ! »1 Pourquoi les cieux, la terre et les montagnes ont refusé de porter cette amana, et pourquoi l’homme s’en est chargé ? Pourquoi, ils ont eu peur, et pourquoi l’homme est considéré comme un injuste et un ignorant ? En répondant à ces questions nous pourrons comprendre le sens de ce dépôt qu’est la amana. Déjà, ce que nous pouvons dire à partir du verset c’est que l’homme est blâmé consécutivement à la prise de cette charge, ce qui implique qu’elle l’expose nécessairement à un risque de chuter et qu’il n’avait, justement, pas mesuré l’importance de ce risque avant de le prendre. En outre, la différence évidente entre l’homme et les autres créatures c’est que l’homme possède une liberté plus complète, à savoir non seulement celle d’obéir, mais aussi celle de désobéir. Et, c’est pourquoi, Ibn Abbas considérait ce dépôt comme étant celui de « l’obéissance !» A partir de là, prendre la responsabilité de porter le dépôt de l’obéissance ne peut s’opérer sans l’exposition à des tentations à même de nous pousser à désobéir, et c’est cette lucarne vers la désobéissance que les cieux, la terre et les montagnes ont refusé avant leur refus de porter la amana car porter le dépôt présupposerait l’éventualité d’agir dans la négation du divin ! Et, y a-t-il plus grande injustice que de se mouvoir en vue de satisfaire un autre qu’Allah ? Et parfois, au détriment de la satisfaction d’Allah ! Aussi, plus l’homme acquiert de la liberté, plus il court le risque de s’écarter de son Seigneur car la liberté ici le porte à courir derrière la satisfaction de ses propres besoins, qui à leur tour, nourriront en lui l’illusion de sa propre indépendance ! C’est dans ce sens que, généralement les pauvres sont plus proche de la foi que les riches même si cette règle n’est pas absolue, et que l’on trouve souvent des gens riches bien plus croyants que des pauvres. S’attarder sur la notion de liberté est cruciale pour ce qui concerne notre sujet car il faut lever le paradoxe à son endroit, et ce, entre ses beautés et ses laideurs, car il est vrai que d’un côté elle est la cause de notre éloignement vis-à-vis d’Allah mais d’un autre côté : c’est quelque chose que l’on doit conquérir, particulièrement dans ce monde où les hommes veulent, très souvent, asservir leur semblable ! Aussi, il est important de faire la part des choses entre la liberté dont le sens implique l’élargissement des options du mouvement et la liberté dont le sens implique le capacité à choisir entre ces différentes options. La première liberté est risquée, si elle n’est pas accompagnée par la seconde, qui se doit impérativement d’être saine car exercer son droit de choisir librement sans avoir la capacité de bien choisir risque de pousser l’individu à dévier immédiatement lorsque se développeront ses options dans le mouvement, et ce, en poursuivant le choix le plus plaisant ! C’est ce qui explique pourquoi les ados plongent, souvent, dans une phase de rébellion à l’endroit de leurs parents quand ils aspirent à poursuivre des plaisirs dont ils ne mesurent pas les conséquences dramatiques à leur âge !